ÉPISODE #8: La bwate du printemps.

Le printemps, c’est hostile. Les bourgeons expulsent leurs toxines de pollens mortels, les libidos s’embrasent et réduisent nos quotients intellectuels, les rayons du soleil irradient nos enveloppes charnelles. Mais j’ai de quoi vous faire passer un peu de temps à l’intérieur, bien à l’abri du fléau printanier. En vrac : des mathématiques, du story-telling entre-mêlé, du porno gay suggestif, du plateformer exigeant et enfin de quoi matraquer son clavier avec le front, littéralement.

SINERIDER

OùKonJoue: sinerider.com | KiKiafé: Christopher Walker
Keske sé: 15 minutes / Gratuit / BrowserGame, Unity / Les maths c’est fun
sinerider
Dame Kaelin; Un nom qui résonne dans l’inconscient intime de toute personne ayant déjà été effleuré par l’univers de l’heroic fantasy comme le parfait sobriquet pour une elfe de la nuit archère, par exemple. Détrompez-vous, car il s’agit du nom de famille de ma dernière professeure de collège ayant eu pour noble tâche de m’éduquer aux merveilles complexes de la Mathématique. Aujourd’hui, je suis content de pouvoir rendre hommage à mon ancienne tortionnaire, grâce à la preuve irréfutable de ses carences en pédagogie.

En effet, grâce à SineRider j’ai enfin pu goûter à cette agréable sensation qui consiste à piger quelque chose aux fonctions « avancées » décrivant des courbes. Autant vous dire que cette clarté de l’esprit ne m’a jamais assaillie durant les cours dispensés par dame Kaelin. Mais là, juste en ajustant des chiffres un peu au bol, les lignes se tordent, se rabaissent ou s’élèvent, permettant ainsi à des lugeurs de glisser dessus et de passer au travers de différents checkpoints et autres objectifs. Le tutoriel nous prend délicatement par la main, là où dame Kaelin m’assénait de problèmes au storytelling indubitablement douteux et hypocrite. De fait, le joueur acquiert lentement et presque intuitivement des notions de base qui s’empilent les unes sur les autres et dont il faut ensuite user habilement pour progresser au travers des différents niveaux.

Sérieusement, si j’avais eu SineRider dans les pattes lorsque je répétais pour mon bac, j’en aurai certainement grave moins chier.

 

 

PROVIDENCE

OùKonJoue: gamejolt | KiKiafé: Eight Bits Skyline
Keske sé: 10 minutes / Gratuit / PC / Du plot twist et du Chopin
Providence
Providence est une histoire à peine interactive comme j’ai fréquemment l’habitude de vous en parler. On s’y déplace avec les flèches du clavier, en interagissant de temps à autre sur quelques éléments disséminés dans les tableaux. Le jeu n’est pas très explicite lorsqu’il s’agit de nous communiquer ce qu’il attend de nous. Peu importe, de toute façon on essaie tout. L’intérêt de Providence se trouve ailleurs et daigne dès les premières minutes titiller notre curiosité.

En effet, tour à tour le jeu s’articule entre trois protagonistes radicalement différents, mais dont les destins apparaissent comme forcément liés. Un vieux monsieur qui reçoit des paquets par la poste, un jeune enfant interpellé par un inconnu à la requête étrange et finalement un monsieur fort bien habillé aux sombres desseins. Tôt ou tard, ces trois personnages doivent se retrouver, c’est inéluctable. La grande question qui anime dès lors le joueur ne cesse de grandir : Comment ?

Bien évidement, je vous laisse le découvrir, car c’est là tout l’intérêt du jeu. Je ne pourrai cependant m’empêcher de vous révéler que quels que soient vos choix, ceux-ci n’auront que très peu d’incidence. Le jeu narre des destins croisés à l’inéluctable finalité. Mais la manière dont ce message est amené, grâce à son twist et à la mécanique du jeu, demeure on ne peut plus élégant.

 

 

STICK SHIFT

OùKonJoue: itch.io | KiKiafé: Robert Yang
Keske sé: 4-7 minutes / Gratuit / PC, Mac, Linux / Conduite nocturne et plaisir érotique d’une voiture gay
stickshift
Dernier volet de la trilogie de Robert Yang qui visiblement s’amuse beaucoup à explorer toutes les manières dont il est possible de suggérer la sexualité gay au travers du jeu vidéo. Après Hurt Me Plenty et Succulent dont je vous parlais déjà dans d’autres Bwates, Stick Shift passe à la vitesse supérieure, et c’est le cas de le dire.

Cette fois-ci le joueur se trouve aux commandes de la main d’un jeune homme conduisant de nuit. Avec la souris, il vous incombe de caresser le manche de la boîte à vitesse afin de faire monter les tours, excitant ainsi votre engin. Lorsque la tension monte, il faut passer à la vitesse supérieure… jusqu’à atteindre ce qui ressemble à un orgasme.

À nouveau, l’expérience que propose Robert Yang peut ressembler à une bête blague tordue. Mais ce serait une vulgaire erreur que de s’arrêter sur cette conclusion. Chris Priestman décortique le jeu sur KillScreenDaily et nous éclaire sur les inspirations/références de son créateur, qui apparaissent dès lors absolument évidentes. De la nouvelle Crash de J.G Ballard’s au moyen-métrage d’Andy Warhol’s BlowJob, Stick Shift devient ainsi un condensé de réflexions et d’interrogations à de multiples niveaux.

Au-de-là de cette perspective à la limite de la branlette intellectuelle (hihi), force m’est de reconnaître que Stick Shift n’en demeure pas moins mémorable. Lorsque j’ai commencé à m’acharner sur ma souris pour stimuler le symbole phallique de ma voiture, ma chaise s’est mise à grincer, tandis que le visage du protagoniste s’illuminait progressivement, prenant visiblement son pied. Certes, le décorum reste indéniablement saugrenu, mais l’expérience vécue éveille bel et bien des pensées lubriques. Même s’il restera toujours difficile de n’effleurer ne serait-ce qu’une once de la complexité des rapports sexuels au travers d’un jeu vidéo, Robert Yang réussit avec sa trilogie à faire réfléchir à d’autres manières plus pertinentes de la représenter. Loin des habituelles cut-scenes à peine interactives grotesques auxquelles d’autres jeux nous ont habituées, ici le sexe est au coeur du jeu, sans hypocrisie, aucune.

 

 

PAPERTHIN

OùKonJoue: gamejolt | KiKiafé: Nath Pash Design
Keske sé: 15-20 minutes / Gratuit / PC / Permadeath Plateformer
paperthin
Paperthin m’ennuie un peu car il anéantit une règle que je croyais inhérente à tous les bons plateformers sur lesquels je me suis déjà acharné; à savoir qu’un level design soigné est nécessaire à une expérience de jeu réussie. Ici, ce n’est pas le cas. En effet, les niveaux y sont générés aléatoirement et cela ne dérange en rien, au contraire même.

Au début de chaque partie, le joueur commence avec un maigre capital de cinq vies, chaque erreur ampute la réserve d’un coeur. Rien de bien foufou jusqu’ici me direz-vous, si ce n’est qu’une fois à zéro, tout est perdu, il faut recommencer dès le début. Mais le début de quoi finalement, vu que les niveaux sont générés aléatoirement et de fait à chaque fois différents ? Autre partie pris intéressant, il n’y a aucun power-up à débloquer. Dès le début du jeu, le joueur bénéfice de toute la panoplie de mouvements nécessaires à la réussite de son périple : saut, double-saut, wall-jump, dash, attaque. D’ailleurs, ces derniers réagissent au doigt et à l’oeil, mais sont encore plus agréables lorsque gérés à la manette, évidement.

La difficulté quant à elle est également intelligemment pensée. Lorsqu’on échoue en s’empalant sur des piques ou les projectiles des ennemis, le jeu nous ramène au dernier endroit safe où l’ont se trouvait juste auparavant. La plupart du temps, cela se traduit par un retour à une demi-seconde en arrière. Cela renforce le rythme du jeu qui se veut déjà assez soutenu, de par la vélocité de notre personnage qui incite à parcourir rapidement les niveaux en bondissant de long en large sur les bonus à ramasser. D’ailleurs, je vous déconseille fortement de rester immobile trop longtemps, sous peine d’être confronté à une vilaine surprise. Le jeu ne vous permet pas d’enclencher la pause, mais réagit bel et bien à la touche escape. Ce n’est pas anodin.

Paperthin est un jeu amusant mais exigeant qui ne se laisse pas prendre en tort. L’échec ne peut être imputé qu’aux maladresses ou mauvaises anticipations du joueur. Si bien qu’au game over, difficile de résister à l’envie de recommencer une nouvelle partie en se persuadant que cette fois-ci c’est la bonne. Son petit côté « rogue-like » insufflé par la génération aléatoire de ses niveaux et sa mort permanente ne font que renforcer ce sentiment qui finalement se trouve à des années lumières de la sauce actuelle des autres plateformers qui se positionnent plus généralement comme des Die and Retry. À méditer, donc.

 

 

TELEPATHY TRAINER

OùKonJoue: itch.io | KiKiafé: Flex Roman
Keske sé: 5 minutes / Gratuit / PC / Commotion cérébrale friendly
Via: oujevipo
telepathy
Telepathy trainer est un jeu à jouer en public. Téléchargez-le et jouez-y au bureau, si possible lorsque votre emploi du temps s’y prête le moins possible. En effet, comme son nom l’indique, c’est votre cerveau qui sera mis à contribution, ou alors votre boîte crânienne si tout comme moi vous n’avez jamais réussi à tordre une cuillère avec la seule force de votre esprit.

Ainsi, le commun des mortels se retrouvera à taper sur son clavier avec le nez ou carrément le front, afin de détruire les projectiles qui traversent l’écran. Autant vous dire qu’on se sent rapidement très con à rouler des joues sur les touches graisseuses de son clavier. Mais au-de-là du gag, cette interaction sauvage a des propriétés défoulantes. Quoi de plus sympathique donc que d’exhiber cet exutoire bienvenue à ses collègues de boulot qui auront tôt fait de questionner votre santé mentale. « Non mais c’est cool les gars, je suis juste en train de parfaire mes compétences télékinésiques. »

Voilà, chocobisous.