Entre les petits avatars idiots de Nintendo et moi c’est compliqué. Comme chacun, j’ai commencé par les haïr et aujourd’hui, à la veille de leur extinction, je suis bien forcé de me demander si je ne vais finalement pas les regretter.
Les Miis ont été de nombreux jeux: ils ont fait du tennis, de la baston, du kart ou encore de la simulation de voisinage, mais le RPG est de loin ce qui le va le mieux. Ceci pour une raison assez évidente: c’est un des rares genres dont la vocation principale est de raconter une histoire, voire pour les meilleurs de laisser le joueur se raconter ses histoires. Quoi de plus approprié dans ce cas que de pouvoir mettre en scène ses amis dans une aventure regroupant Miyamoto, Jesus, Chuck Norris ou encore Barack Obama.
Comme tout bon RPG classique venu du soleil levant, Miitopia propose une histoire colonne vertébrale à laquelle le joueur va insuffler quelques variations. Plus original, ce dernier va devoir en définir tous les personnages principaux au fil de l’aventure. Le roi obèse du premier village peut aussi bien être votre pote Dédé que Gabe Newell ou Donald Trump. Sa fille et ses prétendants sont évidemment aussi laissés à votre bon vouloir. Ainsi l’histoire est toujours la même mais sa signification peut prendre des tournures bien différentes selon les acteurs choisis. Donald Trump cherchant à marier sa fille au fils de Poutine plutôt qu’à celui de Hollande a une portée politique bien différente que Dédé ordonnant à Snake d’oublier Chuck Norris pour rejoindre les bras de Hulk Hogan.
Nintendo a structuré entièrement son jeu autour du plaisir de ces rencontres contre-nature. Tous les aspects ludiques du RPG traditionnel ont été lissé pour laisser place à un maximum de situations mettant en scène les relations entre les Miis. Les combats par exemple ne nous laissent le contrôle que sur notre personnage, les choix des compagnons n’étant régi que par les relations qu’ils ont forgés au fil de l’aventure. Wuthrer que vous avez mis toutes les nuits dans la même chambre que David sera plus enclin à prévenir ce dernier d’une attaque ou à le soutenir dans un assaut qu’à aider Sandro avec qui il s’est disputé à propos de la couleur de sa nouvelle poêle à frire. Les classes de personnages, elles aussi, sont pensées pour maximiser les situations cocasses. Si l’on en retrouve bien une ou deux de classique elles sont majoritairement hautes en couleurs. On y trouve par exemple le chanteur, le cuistot, le diable ou encore le chat. De la même manière les déplacements ont été réduits à leur plus simple appareil: l’équipe progresse sur un chemin prédéfini entrecoupé de combats et de petites saynètes aléatoires mettant en valeur les relations entre les personnages. Le point culminant de ces pérégrinations est un stop dans une auberge ou en plus de décider qui dort avec qui ont pourra nourrir nos personnages et leur donner des sous pour s’acheter de quoi se renforcer. Evidemment, même ces éléments de jeu sont sujets à la mise en scène relationnelle: les Miis n’aiment pas tous la même chose et n’achètent pas forcément ce qu’ils ont demandé, des choix que ne manqueront pas de critiquer leurs amis.
Est-ce que Miitopia est le RPG au long cours de cet été? Sûrement pas. Au vu de ses choix de design particulier, il n’est inévitablement pas pensé pour des sessions de jeu de dix heures mais plutôt des petites tranches de vingt minutes le soir avant de se coucher comme le souligne Nintendo à travers ses multiples suggestions de pause lors des arrêts dans les auberges. Par contre, est-ce que Miitopia mérite votre attention de game designer curieux? A coup sûr.